En s’adressant directement aux « citoyens d’Europe », Emmanuel Macron prend acte de son isolement politique dans l’Union. Un an et demi après son discours-programme de la Sorbonne, en septembre 2017, le constat ne peut plus être esquivé : aucun gouvernement ne soutient ses ambitieux projets de réforme d’une Europe que le chef de l’État juge « amollie » et « en danger ». Le président le plus europhile que la France se soit donné depuis François Mitterrand a vu son élan se briser dans les sables mouvants merkeliens. Sa lettre aux Européens se lit donc comme une manœuvre audacieuse ou désespérée de se relancer sur le théâtre communautaire en passant par-dessus la tête des classes politiques nationales.
Le cœur de sa tribune n’est pas l’énumération de ses projets, qui n’ont quasiment aucune chance de voir le jour en l’état, mais dans son appel final aux citoyens. Il demande, en effet, la mise en place d’une « Conférence pour l’Europe afin de proposer tous les changements nécessaires à notre projet politique, sans tabou, pas même la révision des traités ». Outre les représentants des institutions communautaires et des États, elle associerait des « panels de citoyens, auditionner(ait) des universitaires, les partenaires sociaux, des représentants religieux et spirituels » pour définir « une feuille de route ».
Emmanuel Macron se situe ainsi délibérément hors des traités européens qui prévoient déjà la possibilité de mettre en place une « Convention européenne » destinée à réviser les traités. Mais il s’agit d’une instance formelle uniquement composée de représentants des États et des institutions communautaires. Sa proposition de « Conférence » se situe à mi-chemin entre la Convention et les Consultations citoyennes sur l’Europe qu’il a lancé en 2018 qui n’ont guère mobilisée en dehors de l’Hexagone… Sans doute grisé par le succès du grand débat national qu’il mène tambour battant, le chef de l’État espère qu’en mettant au défi ses partenaires de consulter leur peuple, il parviendra cette fois à ses fins.
Tous les sondages le montrent : l’attachement à l’Union et à l’euro est de plus en plus fort depuis le fiasco du Brexit. Mais, en même temps, les citoyens manifestent leur mécontentement vis-à-vis de l’Europe telle qu’elle est en votant de plus en plus nombreux pour des partis démagogues et/ou d’extrême droite. C’est un véritable défi existentiel pour l’Union : comment est-il possible que le projet européen qui a été conçu au lendemain de la Seconde Guerre mondiale comme un barrage à l’autoritarisme et au fascisme se retrouve à nouveau confronté à ses vieux démons ?
Pour Emmanuel Macron, sortir du statu quo actuel qui fait le lit des nationalistes est donc vital. Mais il évite curieusement le sujet central du malaise européen, celui de la démocratie, du contrôle de ce qui se décide à Bruxelles. Pas un mot sur une zone euro dont les institutions échappent à tout contrôle parlementaire alors qu’elles pèsent sur les choix économiques et budgétaires des États ; pas un mot sur la Commission devenue un « moloch bureaucratique » ; et pas un mot sur le nerf de la guerre, le budget (de l’Union ou de la zone euro) dont les recettes et les dépenses devraient être votées par un Parlement. En fait, le Président de la République évite tout ce qui a déjà fâché les chrétiens-démocrates allemands...
En lieu et place, il propose de créer de nouvelles institutions : Agence européenne de protection des démocraties, Conseil européen de sécurité intérieure pour gérer les flux migratoires, force sanitaire européenne, instance de supervision européenne des plates-formes numériques, Conseil européen de l’innovation. Le problème est que ces missions sont déjà en tout ou partie assurées par les institutions communautaires actuelles : s’agit-il de déshabiller la Commission pour remettre le pouvoir aux États ou à des agences indépendantes ? Le vrai problème n’est-il pas plutôt celui de ses compétences, du contrôle démocratique et de ses moyens budgétaires ? Ainsi, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) qui assure déjà le « contrôle de nos aliments » a surtout besoin d’être réformée et de moyens budgétaires. De même, la « Banque européenne du climat pour financer la transition écologique » ne risque-t-elle pas de faire double emploi avec la Banque européenne d’investissement ?
Il propose aussi de changer les priorités de l’Union en remettant « à plat de l’espace Schengen » - afin de lier suppression des contrôles fixes aux frontières et politique commune d’asile-, en créant une « préférence européenne », en réformant le droit de la concurrence et la politique commerciale ou encore en fixant un salaire minimal dans chaque État membre dont le niveau serait fixé chaque année par Bruxelles.
Emmanuel Macron sait que ses propositions sont désormais partagées pas une bonne partie de la population européenne qui veut davantage de protections. C’est son pari : si le débat sur l’Europe que veulent les peuples est lancé, la dynamique pourrait tout balayer sur son passage. Mais ses partenaires le savent aussi.
N.B. : version longue de l’article paru dans Libération du 5 mars.
PHOTO LUDOVIC MARIN. AFP
18-19 février 2019 Institut polonais des affaires internationales
compte rendu rédigé par Kinga Torbicka
Le 18 février 2019, à l'Institut polonais des affaires internationales a eu lieu la conférence "Renforcer l'économie de l'UE: la perspective V4-France”. Elle s'est déroulée dans le cadre du projet "Développement d'une nouvelle voie pour une coopération renforcée et améliorée V4-France" (cofinancée par les gouvernements de la République tchèque, de la Hongrie, de la Pologne et de la Slovaquie grâce aux subventions du Fonds international de Visegrad). Le lendemain ont eu lieu des ateliers d'experts sur la compétitivité et l'intégration dans l'Union européenne de la perspective du groupe de Visegrad et de la France ainsi que sur l'avenir de „l'Europe sociale”.
En tant qu'organisation régionale à forte ambition géopolitique et économique, le groupe Visegrad doit redéfinir ses relations avec la France comme l'un des partenaires stratégiques en Europe. La volonté de renforcer le partenariat franco-allemand sur le forum européen, l'approche du Brexit va changer l'avenir du processus décisionnel au niveau de l'UE, sa dynamique de pouvoir et la construction d'une coalition. La nouvelle situation reste sans aucune doute un défi pour l’unité du V4 et la défense de leurs intérêts communs. Par conséquent, il est nécessaire de trouver un niveau de coopération socio-économique bilatérale et / ou multilatérale entre le V4 et la France.
Durant la première journée la conférence a servi aux échanges parmi des invités. Selon Daniel Bartha (Centre d'intégration euro-atlantique et de démocratie) du point de vue du pragmatisme économique, la France reste et restera à jamais un partenaire plus important pour la Hongrie que d’un point de vue politique. Vincent Biret (Conseiller pour les affaires économiques de l'ambassade de France en Pologne) estime que la coopération entre la France et le V4 crée des fondements importants pour la coopération au niveau de l'UE.
Emmanuel Macron, dans son discours à la Sorbonne à Paris le 26 septembre 2017, a souligné la nécessité de réformes dans l'UE afin de protéger l'économie européenne. Pour la France, le V4 reste un partenaire économique important en Europe. Une éventuelle coopération peut avoir lieu dans le cadre du marché unique numérique. Cette position est partagée par Martin Michelot (Institut Européen pour la politique européenne).
La République tchèque considère la France comme un partenaire important dans le commerce et l’investissement. Matej Navrátil (Département des sciences politiques, Université Comenius) a souligné que le V4 reste une force économique régionale importante. La Slovaquie, en tant que membre de la zone euro, participe à presque tous les projets ID. Selon Sebastian Płóciennik (Institut polonais des affaires internationales), l'Allemagne, en raison de sa proximité avec les pays du V4 et de la vigueur de son économie, reste un partenaire économique important en tant que facteur d'équilibre de la coopération germano-française.
L’adaptation des réglementations légales, y compris les réglementations fiscales, au développement de la coopération économique dans de nouveaux domaines, tels que les nouvelles technologies, l’innovation, le secteur bancaire et les infrastructures, constitue le défi le plus important auquel sont actuellement confrontés les pays de V4. Le projet de la création d’une zone de développement industriel en Europe centrale à l’instar de la "Silicon Valley” constitue un défi pour l’avenir.
Il est important de montrer la coopération entre le V4 et la France dans un contexte européen. Il existe de nombreux problèmes communs dans lesquels il est possible de rapprocher (ou non) le V4 de la France: le budget de l'UE, le changement climatique, la Chine, l'union bancaire et les règles de la compétitivité.
Un rapport spécial sera publié à la fin de 2019.
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18-19 luty 2019 Polski Instytut Spraw Międzynarodowych
Konferencja i warsztaty „Wzmocnienie gospodarki UE: perspektywa V4-Francja”
18 lutego 2019 roku w Polskim Instytucie Spraw Międzynarodowych miała miejsce konferencja „Wzmocnienie gospodarki UE: perspektywa V4-Francja” zorganizowana w ramach projektu „Opracowanie nowej drogi dla wzmocnionej i ulepszonej współpracy V4-Francja” (współfinansowany przez rządy Czech, Węgier, Polski i Słowacji poprzez granty Wyszehradzkie z Międzynarodowego Funduszu Wyszehradzkiego). Następnego dnia miały miejsce warsztaty ekspertów dotyczące konkurencyjności i integracji w Unii Europejskiej z perspektywy Grupy Wyszehradzkiej i Francji oraz przyszłości „Europy socjalnej”.
Grupa Wyszehradzka jako organizacja regionalna z silnymi ambicjami geopolitycznymi i gospodarczymi w zaistniałej sytuacji musi przedefiniować swoje relacje z Francją, jako jednym ze strategicznych partnerów w Europie. Chęć wzmocnienia partnerstwa francusko-niemieckiego na forum europejskim, zbliżający się Brexit zmienią przyszłość procesu decyzyjnego na szczeblach UE, jej dynamikę władzy i budowanie koalicji. Nowa sytuacja stanowi bez wątpienia wyzwanie dla jedności V4 i obrony wspólnych interesów. Wobec tego konieczne jest znalezienie płaszczyzny społeczno-ekonomicznej współpracy bilateralnej i/lub multilateralnej między V4 a Francją.
Według Daniel Bartha (Centre for Euro-Atlantic Integration and Democracy). Z punktu widzenia ekonomicznego pragmatyzmu Francja jest i będzie dla Węgier ważniejszym partnerem niż z perspektywy politycznej. Vincent Biret (Conseiller do spraw ekonomicznych Ambasady Francji w Polsce) uważa, że współpraca między Francją a V4 stwarza ważne fundamenty kooperacji na płaszczyźnie UE. Emmanuel Macron w swojej przemowie na Sorbonie w Paryżu 26 września 2017 roku podkreślał, że w UE jest potrzeba reform aby chronić gospodarkę europejską. Dla Francji V4 pozostaje ważnym partnerem gospodarczym w Europie. Potencjalna możliwa współpraca może odbywać się w ramach jednolitego rynku cyfrowego. Stanowisko to podziela Martin Michelot (EUROPEUM Institute for European Policy). Republika Czeska postrzega Francję jako istotnego partnera w wymianie handlowej i inwestycjach. Matej Navrátil (Departament of Poliitcal Science, Comenius University) podkreślił, że V4 pozostaje znaczącą regionalną siłą ekonomiczną.
Słowacja jako członek strefy euro uczestniczy w prawie wszystkich projektach DI. Zdaniem Sebastiana Płóciennika (Polski Instytut Spraw Międzynarodowych) Niemcy ze względu na bliskie sąsiedztwo z krajami V4 i silną gospodarką pozostają ważnym partnerem ekonomicznym jako czynnik równoważący współpracę Niemcy-Francja. Najważniejszym wyzwaniem jakie stoi obecnie przed państwami V4 to dostosowanie regulacji prawnych, w tym podatkowych do rozwoju współpracy gospodarczej w nowych dziedzinach, takich jak nowe technologie, innowacyjność, sektor bankowy, infrastruktura. Takim wyzwaniem może być stworzenie w Europie Środkowej na wzór „silicon valley” strefy rozwoju przemysłowego.
Ważne pozostaje ukazanie współpracy między V4 a Francją w kontekście europejskim. Pojawia się dużo wspólnych problemów, w których pojawia się możliwość zbliżenia (lub nie) między V4 a Francją: budżet UE, zmiany klimatyczne, Chiny, unia bankowa, zasady konkurencyjności.
Podsumowaniem dwudniowego spotkania ma być raport, który będzie opublikowany pod koniec 2019 roku.